Taux d’emploi : pourquoi un tel écart par rapport à l’Allemagne?

Une grande partie de l’écart de richesses entre la France et l’Allemagne s’explique par le taux d’emploi. Depuis plusieurs décennies, ce dernier est en France nettement plus faible que celui de l’Allemagne. Cet écart conduit à un déficit plus élevé à l’ouest du Rhin et par voie de conséquence à une dette bien plus importante.

En 2022, le taux d’emploi des 15-64 ans en France est de 68 % de la population concernée contre 77 % en Allemagne. L’écart est de 8 points quand, en 2003, il n’était que d’un point toujours en faveur de l’Allemagne (63 % contre 62 %). Si la France avait le même taux d’emploi que l’Allemagne, son nombre d’emplois serait supérieur de 12 % à son niveau actuel. Il en serait de même pour le PIB. Une partie non négligeable de l’écart de PIB par habitant, écart de plus 7 000 euros en 2021, serait effacée (le PIB par habitant est de 51 000 euros en Allemagne, contre 43 500 euros en France). Selon Patrick Artus, chef économiste de Natixis, le déficit public français de 5 % du PIB en 2022 se transformerait en un excédent public de 1 % du PIB, sous réserve que la propension des gouvernements français à accroître les dépenses n’aboutisse pas à dilapider le gain potentiel de cet hypothétique taux d’emploi.

Quoi qu’il en soit, depuis vingt ans, le taux d’emploi en France est faible par rapport à celui de son partenaire germanique. Parmi les différences entre les deux pays, figure le taux d’emploi des jeunes. Pour les 16/29 ans, il atteint 46 % en France contre 60 % en Allemagne. L’écart est de 14 points en 2022, contre 6 points en 2003. Le taux de chômage des jeunes est de 16 % en France, contre moins de 5 % en Allemagne. Le taux de jeunes qui ne sont ni en études ni en emploi est 15 % en France contre 10 % en Allemagne. Avec le développement de l’apprentissage depuis 2018, la France comble son écart avec l’Allemagne.

En France, en 2021, 733 200 nouveaux contrats d’apprentissage ont été signés, soit 38 % de plus qu’en 2020 qui avait déjà connu une hausse de 44 % par rapport à 2019. Sur deux ans, entre 2019 et 2021, le nombre d’entrées dans l’apprentissage double. La quasi-totalité des contrats (97 % de ceux commencés en 2021) est signée dans le secteur privé.

Fin 2021, le nombre d’apprentis s’élève à 892 100, soit 33 % de plus que fin 2020. Ce fort développement résulte de la réforme de l’apprentissage portée par la loi « Avenir professionnel », ainsi que de l’aide exceptionnelle pour l’embauche d’un jeune en apprentissage mise en place mi-2020 dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution » dans le cadre de la crise sanitaire. Les mineurs représentent seulement 19 % des nouveaux contrats d’apprentissage dans le secteur privé en 2021, contre 37 % en 2018. Les apprentis de 20 ans ou plus sont désormais majoritaires ; ils représentent 57 % des contrats privés commencés en 2021, contre 38 % en 2018.

Si une amélioration est constatée en matière d’apprentissage, en revanche, le niveau des compétences de la France continue à baisser pesant par voie de conséquence sur la productivité.

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Le faible taux d’emploi de la France s’explique également par le départ précoce des actifs à la retraite. L’âge effectif de départ à la retraite est en France, en 2020, de 62,4 ans contre près de 64,4 ans en Allemagne (source : OCDE).

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En France, les règles d’indemnisation du chômage sont plus généreuses qu’en Allemagne avec une durée d’indemnisation plus longue. La durée maximale peut atteindre 36 mois en France, contre 24 mois en Allemagne. Les conditions d’attribution (période travaillée avant de bénéficier de l’indemnisation) sont également plus strictes chez cette dernière. Cette différence de traitement conduit à un taux de chômage supérieur en France, 5 points en moyenne d’écart par rapport à celui de l’Allemagne. La durée moyenne d’indemnisation dépasse 11 mois en France.

Les prestations sociales et en particulier les minima sociaux sont plus généreuses en France qu’en Allemagne. La part du PIB consacrée au marché du travail est deux fois plus importante en France qu’en Allemagne. Les dépenses publiques pour les familles sont plus élevées (aides au logement, allocations familiales, etc.).

L’employabilité des adultes (30/59 ans) est plus faible en France qu’en Allemagne (82 % contre 84 %). En 2004, de part et d’autre du Rhin, le taux d’emploi était identique pour cette catégorie de la population. Le faible niveau de compétences des actifs français est souvent mis en avant pour expliquer ce sous-emploi chronique.

L’écart de taux d’emploi entre la France et l’Allemagne était de 8,5 points en 2021, expliquant en grande partie les difficultés économiques auxquelles est confrontée cette première. La faiblesse de l’emploi des jeunes en France, due aux problèmes du système éducatif explique 4,4 points sur les 8,5 points. Les départs précoces à la retraite en expliquent 2,9 points et la faible employabilité des actifs 1,2 point.

Crédit Photo : Can Stock Photo – Tatiana53

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