Innovation : la stratégie Océan bleu, ou comment sortir du cadre pour échapper à la concurrence

Les professeurs de stratégie W. Chan Kim et Renée Mauborgne ont développé un nouveau cadre pour penser l’approche de la concurrence sur les marchés. Ils distinguent l’« océan bleu » de l’« océan rouge », deux métaphores décrivant des environnements d’affaires diamétralement opposés.

L’océan rouge, teinté du sang des requins de la concurrence, évoque un environnement saturé où les entreprises se livrent une bataille acharnée pour une part du gâteau qui n’est pas extensible. Ici, le jeu est à somme nulle : celui qui gagne des parts de marché le fait au détriment d’un autre acteur. Les frontières du secteur sont définies et acceptées, les règles du jeu compétitif bien connues. Les entreprises cherchent à s’approprier une part plus importante de la demande existante. Dans l’océan rouge, les produits deviennent indifférenciés, conduisant à une guerre de prix sans fin. La concurrence est féroce.

À l’opposé, l’océan bleu, vaste et inexploré, représente des marchés encore inexistants, des espaces vierges de concurrence. Ces océans symbolisent une opportunité pour les entreprises de créer et capturer de nouvelles demandes, d’innover et de briser les règles du jeu existantes. Plutôt que de se battre pour une part d’un marché existant, les stratégies de l’océan bleu encouragent les entreprises à créer leur propre marché. Il y a ici création d’une demande nouvelle, d’une croissance exceptionnelle, bien souvent en écartant les frontières concurrentielles actuelles de l’océan rouge. C’est ce que l’on appelle également l’« innovation de rupture ».

Des opportunités…

Un exemple emblématique de l’océan bleu est l’arrivée de la société Cirque du Soleil sur le marché du divertissement. En fusionnant les concepts de cirque traditionnel et de théâtre artistique, le Cirque du Soleil a créé une nouvelle forme de divertissement, évitant ainsi une concurrence directe avec les cirques traditionnels et les théâtres. Le résultat ? Un océan bleu d’opportunités où la concurrence est devenue négligeable.

Un autre exemple remarquable est celui d’Apple avec son iPhone. Avant 2007, les smartphones étaient principalement utilisés par les professionnels et étaient considérés comme des outils complexes et peu attrayants pour le grand public. Apple a repensé l’ensemble du concept, rendant les smartphones simples, élégants et accessibles à tous. L’iPhone a créé un nouvel océan bleu, redéfinissant le marché des téléphones mobiles et en refaisant d’Apple, marque déclinante, un nouveau leader en matière d’innovation. La création d’un océan bleu n’est toutefois pas sans défis. Elle exige une vision stratégique, une culture d’innovation et une volonté d’aller au-delà des normes existantes, la capacité de « sortir du cadre ». Mais le jeu peut en valoir la chandelle.

… et des dangers

Le défi consiste à créer la demande et le risque réside dans le fait que celle-ci peut très bien ne pas être au rendez-vous. Combien de produits révolutionnaires ont été des échecs cuisants ? Certains produits et services, bien qu’innovant, n’ont pas réussi à capturer ou à créer un marché durable. On se souvient de Google Glass, lancé en 2013. Produit incontestablement visionnaire, Google Glass était un produit visionnaire, mais a rencontré de nombreux obstacles, notamment des problèmes de confidentialité, un manque de clarté quant à son utilisation pratique, et un prix prohibitif. Google a dû interrompre la vente de Google Glass en 2015, bien que l’entreprise continue de développer des versions pour des niches spécifiques.

La théorie de l’océan bleu invite les entreprises à s’affranchir de la logique concurrentielle pour aller vers des eaux plus calmes, moins peuplées, du moins pour un temps. Elle rappelle l’importance de l’innovation et de la créativité dans la recherche de nouvelles opportunités de marché, soulignant l’importance du « non concurrentiel » en tant que voie vers la réussite et la rentabilité. Mais une stratégie d’océan bleu nécessite de prendre en compte les besoins des clients et certains facteurs externes comme les réglementations ou la concurrence en matière technologique.

Crédit Photo : Can Stock Photo – GeraKTV

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